La nuit où éclata la guerre contre les Arabes, nous nous sommes trouvés devant un problème que nous allions retrouver plus d'une fois encore. Devions-nous, oui ou non, participer à cette guerre qui était pour nous une tragédie historique, et qui aurait pu être évitée, si, dans les deux camps, avait prévalu le parti le plus raisonnable? Perdre la guerre, c'était perdre notre pays. Si nous manquions à notre devoir, pour quelque raison que ce fût, nous perdions toute occasion de nous faire entendre une fois la guerre terminée. A l'heure du danger notre place était dans les unités de combat, même si la paix restait notre objeftif.

Je rejoignis la brigade Giva-ti. C'était une formation de la Haga-nah chargée de la défense du sud d'Israël. Je passai plusieurs mois dans l'infanterie, je me battis pour garder la route de Jérusalem, puis luttai contre les Égyptiens qui évacuaient Gaza; ensuite, je pris une part plus active à la guerre, en créant un nouveau type d'unité de combat. Une équipe de commandos montés sur des jeeps découvertes remplaçait une cavalerie de tanks légers. Sa vitesse et son pouvoir de feu compensait le manque de toute armature de proteêüon. Au mois de juin, une unité égyptienne était parvenue à isoler le kibboutz de Negba qui était le point focal de notre défense. On nous donna l'ordre de déloger l'ennemi et de dégager la position fortifiée de la colline 105. Il faisait nuit noire quand, entassés dans huit jeeps découvertes équipées de deux mitrailleuses, nous avons arrosé les tranchées ennemies d'un feu nourri. Le lendemain nous apprenions que nous avions remporté la viétoire décisive de la guerre. Nous reçûmes, en récompense de notre conduite, le titre honorifique de " Renards de Samson " ("Alors Samson s'en fut et prit trois cents renards, puis prit des torches. Il attacha les renards deux par deux par la queue et attacha une torche entre chaque paire de queue et après avoir enflammé les torches, il lança les renards sur les greniers des Philistins ").

Plus tard, j'appris qu'un officier égyptien du nom de Gamal Abdel Nasser avait été blessé au cours de cette bataille. Nous avons dû être très près l'un de l'autre dans la mêlée. Cette association des" Renards " et de Nasser devait se poursuivre tout au long de la guerre. Sans avoir jamais été présentés l'un à l'autre, nous avons dû nous rencontrer des dizaines de fois dans l'obscurité, au cours de combats noêturnes.

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