en vacances après avoir confié au ministre des Affaires étrangères, Moshé Sharett, la charge de Premier ministre et à Pinhas Lavon le portefeuille de la Défense. Personne ne pensa un instant que les vacances de Ben Gourion dureraient cinq mois et qu'après ce laps de temps, il démissionnerait du cabinet.

Ben Gourion avait dit lui-même à des amis qu'il avait besoin de repos pour " recharger ses batteries " et qu'il allait se rendre dans une colonie du désert, à Sdeh Boker, dans le Néguev, pour y méditer en gardant les moutons. Cette déclaration fut reproduite textuellement et avec enthousiasme dans la presse américaine. Mais la véritable raison de cet éloignement était quelque peu différente. En réalité, Ben Gourion avait été mis en minorité au sein de son propre gouvernement. Il avait préconisé une nouvelle" ligne dure " contre l'Égypte. Le cabinet, composé en grande partie de modérés conduits par Sharett avait rejeté les suggestions du Premier ministre. Ben Gourion s'en allait ulcéré, espérant bien être rappelé dans les plus brefs délais, persuadé qu'il était que sans lui, le cabinet allait conduire le pays au gâchis. Il était l'un de ces nombreux Israéliens qui croyaient Ben Gourion indispensable.

La série d'événements qui avaient poussé Ben Gourion à préconiser une politique plus agressive envers l'Égypte, avait commencé une année plus tôt. A cette époque, un groupe de jeunes officiers égyptiens qui avaient tous fait la guerre de Palestine, avaient renversé le roi Farouk. Ils avaient à leur tête le général Mohamed Naguib, quinquagénaire tranquille et fumeur de pipe que Ben Gourion semblait apprécier: le Premier ministre offrit publiquement de prendre l'avion pour Le Caire en vue d'ouvrir des pourparlers de paix. Cette offre ne reçut évidemment aucune réponse. Pas un dirigeant arabe n'aurait osé reconnaître Israël sans avoir obtenu une solution au problème des réfugiés. Au bout de quelques mois il apparut que l'aimable Naguib n'était qu'un personnage décoratif du nouveau régime égyptien. Une personnalité nouvelle, totalement différente, émergeait lentement, celle d'un jeune officier, séduisant et dynamique, le lieutenant-colonel Gamal Abdel Nasser.

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