nières années, il a perdu quelques cheveux mais son sourire juvénile fait oublier sa calvitie. Ce sourire, pourtant, eSt totalement dépourvu de chaleur. C'eSt un sourire figé qui ne le quitte pas, tout au long de ses apparitions en public.

Ces contradictions extérieures ne sont que le reflet d'autres contradictions plus intimes. Au cours des journées d'angoisse qui précédèrent la guerre des Six jours, son esprit de décision fit de Dayan un héros national. Chez lui, nulle répugnance, ni lenteur à décider. L'opinion le réclamait pour leader parce qu'il semblait être l'antithèse de Levi Eshkol qui, selon une plaisanterie classique, lorsqu'on lui demandait s'il prendrait du thé ou du café, répondait, non sans avoir hésité: " Moitié, moitié " - Mais si Dayan décide vite, il arrive souvent que le lendemain, une décision tout aussi rapide vienne contredire celle de la veille. L'ensemble de ses décisions forment une véritable mosaïque, un ensemble peut-être pire que l'indécision.

Dayan s'était d'abord opposé à l'attaque de la vieille ville de Jérusalem, mais il fut le premier à être photographié au Mur des Lamentations. Immédiatement après la guerre, il avait donné l'ordre de détruire la ville de Kalkiliah et d'expulser ses habitants en Trans-jordanie. Mais une semaine plus tard, il venait accueillir en personne les mêmes habitants dans les ruines de la ville. Il exaspéra même ses admirateurs par ses déclarations constamment contradictoires au sujet de l'avenir des territoires occupés.

On dit de lui qu'il parle sans ruse et qu'il dit toujours ce qu'il a sur le cœur, exactement comme il le pense. Ce tour d'esprit guerrier le rend cher au public. Il eSt vrai que Dayan va toujours droit au but; il eSt clair et logique, il a horreur de l'exagération. Mais cela n'a rien à voir avec la sincérité. En fait, Moshé Dayan ne dit jamais ce qu'il pense. Il ne dit ni la vérité ni des mensonges. Pour lui, la vérité, les mensonges ne signifient rien. Il se sert simplement des mots comme de n'importe quel atout pour arriver à ses fins au moment choisi.

Les vieux leaders sionistes habitués à une autre tradition en sont très irrités. Après la guerre, le vieux leader du Mapam (socialiste de

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