de temps en temps. J'y rencontrais des fonctionnaires et des collègues arabes, me promenais dans les rues, respirais les odeurs et mangeais des sucreries orientales. J'écoutais la langue aux sonorités étranges. J'aimais beaucoup tout cela.

Avant mon quinzième anniversaire, j'entrai à l'Irgoun Tsevai Leumi (l'Organisation militaire nationale, communément appelée l'Irgoun), qui à cette époque était la seule organisation nationaliste juive clandestine. J'y adhérai parce que je pensais que le régime colonial britannique n'avait pas à gouverner notre pays. Pendant trois glorieuses années, je fis partie de ce mouvement secret. Pour les Britanniques, j'étais un terroriste, et un combattant de la liberté selon notre définition. Depuis je n'ai jamais oublié cette leçon: un terroriste, à ses propres yeux, se bat pour la liberté, alors que pour l'ennemi, celui qui lutte pour elle est un terroriste.

Je quittai l'Irgoun en 1941, un an avant que Menahem Begin, qui finit par prendre les commandes de l'organisation, ne fût arrivé en Palestine. J'avais maintenant dix-sept ans, et il m'était de plus en plus difficile d'accepter la position de droite, réactionnaire et anti-arabe de l'Irgoun.

Mes années passées à l'Irgoun ont beaucoup compté à plusieurs égards. Aujourd'hui elles m'aident à comprendre ce qui se passe dans l'esprit des jeunes Palestiniens qui rejoignent les rangs des fedayin. Chaque fois que je me demande comment les jeunes Arabes réagiront dans certaines situations dans les territoires que nous occupons, j'essaye de me représenter ce que j'étais à seize ans. Qu'aurais-je ressenti? Qu 'aurais-je fait?

Quand la guerre éclata en 1948, j'entrai dans l'armée de la Haganah, qui devint, vers le milieu des hostilités,

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