Mais en dépit de ces intermèdes de gaîté, nous n'étions pas particulièrement optimistes. Nous avions conscience que le temps fuyait, et que l'OLP était en train de laisser passer une occasion qui ne se représenterait pas de sitôt. 1975 était pourtant une année de grandes possibilités. L'OLP avait gagné la reconnaissance internationale, d'abord à la Conférence au sommet de Rabat, puis à l'ONU. Après son intervention à l'Assemblée générale, Arafat était plus fort que jamais. Il pouvait aller de l'avant.

Hammami m'expliquait pourquoi Arafat ne pouvait pas aller aussi loin que je l'aurais souhaité. Mais parfois, j'avais vaguement l'impression que lui aussi était impatient. Il me dit une fois:

- J'ai demandé à Arafat: « Si une centaine de nations nous reconnaissent, et pas Israël, qu'aurons-nous gagné? » Une question qui allait s'avérer prophétique.

A l'époque Arafat était engagé dans une propagande acharnée contre le président Sadate, qui venait de conclure son accord temporaire avec Rabin. Je demandai à Hammami pourquoi Arafat avec réagi si violemment, d'une façon qui ne pourrait que renforcer son image d'intransigeance en Israël. Il me répondit par une histoire sur les relations cachées entre les deux dirigeants.

D'après lui, au début des négociations entre Kissinger, Rabin et Sadate, le président égyptien avait envoyé un émissaire spécial à Arafat pour lui montrer un projet d'accord qui contenait un paragraphe réaffirmant le droit des Palestiniens à l'autodétermination et à leur propre État. Arafat avait donc ordonné à l'OLP de s'abstenir d'attaquer Sadate pendant les négociations. Mais juste avant la conclusion de l'accord, Sadate avait dû céder sur ce point, et dans le texte final, aucune mention n'était faite de la cause palestinienne. Arafat se sentit floué. Il dénonça l'accord avec fureur, autant à cause de cette trahison que du document lui-même. Toutefois Hammami pensait que l'alliance de

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