leader du Front du Refus. J'exprimai des doutes sérieux sur l'effet que cette scène produirait sur l'opinion publique en Israël. Mais Hammami m'expliqua que ce n'était pas seulement une façon de se serrer les coudes face à un danger mortel, mais aussi un moyen pour Habache de rentrer discrètement dans le courant, favorable maintenant à un règlement politique.

De temps en temps, pendant nos conversations, ma curiosité reprenait le dessus. Je lui posais des questions sur oes sujets que j'avais l'intention de traiter dans Haolam Hazeh. Parmi les lecteurs qui lisaient nos articles sur ce qui se passait dans le monde arabe, qui s'avéraient souvent étonnamment justes, rares étaient ceux qui pouvaient deviner que l'information était venue directement de l'autre côté.

Lui me bombardait de questions sur les différents aspects de la vie juive. Par exemple, pourquoi les Juifs se balancent-ils d'avant en arrière quand ils prient? (Franchement, je l'ignorais. Je suppose que c'est une manière de s'incliner, un geste de soumission devant Dieu.) Quelle était mon attitude à l'égard du sionisme? Je lui expliquai que le sionisme est la conviction la plus répandue en Israël, que pour la plupart des Israéliens il est synonyme de patriotisme. Aucun mouvement pacifiste n'aurait de chances de s'implanter en Israël si on l'identifiait à de l'anti-sionisme. Il comprenait mon propos, sans que, bien sûr, son hostilité extrême à l'égard du sionisme en soit le moins du monde ébranlée. Pour les Palestiniens, en effet, ce terme incarne les causes de leur tragédie, de leur déportation et de leurs malheurs. Sans vraiment nous en rendre compte, nous avions mis le doigt sur un problème qui devait nous poursuivre pendant des années: le mot de sionisme a des implications diamétralement opposées pour les deux camps.

Toujours à ce sujet, il me rappela avec amertume que les États arabes avaient expulsé des centaines de milliers de

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