Mon parti et moi-même avons soutenu l'initiative de Sadate. En tant que pacifistes israéliens, nous ne pouvions que nous réjouir d'une initiative qui entraînait une paix officielle entre Israël et le plus important des États arabes, l'Égypte, si partielle et défectueuse fût-elle.

Je me rendis immédiatement en Égypte, sans visa, et en infraction avec la loi israélienne. Le moment le plus inoubliable fut celui de l'arrivée. J'avais pris un vol grec en provenance d'Athènes. Une fois débarqué, je me dirigeai vers le contrôle des passeports, et tendis mon passeport israélien à un jeune policier en uniforme. Il le prit avec nonchalance et commença à le feuilleter. Je suivais chacun de ses mouvements, ressentant la froide exaltation que je n'ai connue que sur les champs de bataille. Soudain il s'immobilisa, leva les yeux vers moi, et au bout d'un moment un immense sourire illumina son visage.

- Marhaba, dit-il. Bienvenue.

Je retournai plusieurs fois en Égypte, et je lus dans un journal égyptien que le docteur Issam Sartawi, le haut fonctionnaire de l'OLP, s'était prononcé en faveur de l'initiative de Sadate. C'était un acte plein d'audace, exceptionnel, mais naturel de la part de Sartawi, qui avait aussi approuvé l'acceptation par Nasser de l'armistice avec Israël après la guerre d'usure, sept ans plus tôt.

Après les accords de Camp David, j'espérais que l'OLP réagirait par un « oui » mitigé, ou du moins par un « non, mais ». C'était la manière dont les sionistes réagissaient habituellement aux initiatives qu'ils n'approuvaient pas avant la création d'Israël, profitant ainsi de toutes les occasions de gagner du terrain. Mais la tempête d'émotion soulevée chez les Palestiniens par les omissions de Sadate avait rendu cette tactique impossible.

Trois mois après, je fis un nouveau voyage au Caire. Un soir, j'essayai de capter les nouvelles d'Israël sur mon petit transistor. J'étais sur le balcon de l'hôtel Sheraton, admirant la vue sur le Nil, pas encore accoutumé à la sensation onirique d'être dans ce pays, quand le poste se mit à cracher des phrases hachées en hébreu, en provenance de

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