A la fin de la troisième semaine, le samedi 25 juin, le Comité contre la guerre au Liban, qui venait d'être formé, avait organisé une manifestation place des Rois d'Israël, au centre de Tel-Aviv. Une heure avant, des journalistes étrangers me demandèrent combien de manifestants je prévoyais. Je leur répondis tout à fait sincèrement que s'il en venait mille, je considérerais que c'était un succès. On n'avait jamais manifesté contre la guerre en Israël pendant qu'une guerre se déroulait.
Une heure plus tard, il y avait vingt mille personnes. Beaucoup de manifestants étaient des hommes jeunes, qui avaient déjà assisté à des combats en tant que soldats de réserve, et avaient été rendus à la vie civile.
Ce triomphe enhardit le mouvement La Paix maintenant, qui était resté en retrait les premières semaines, et qui appela à manifester en son nom le samedi suivant, 3 juillet. Une heure avant ce rassemblement, la radio israélienne diffusa un communiqué de l'OLP, qui venait d'être publié à Beyrouth, et qui annonçait qu'Uri Avnery avait rencontré Yasser Arafat à Beyrouth-Ouest.
Des amis habitant les États-Unis me demandèrent de venir immédiatement rendre compte de cette rencontre. Alors qu'elle avait fait les gros titres des journaux européens - le Times de Londres avait parlé d'entrevue historique - les médias américains ne l'avaient même pas citée. Mes amis pensaient qu'en venant aux États-Unis, je pourrais briser ce qui avait tout l'air d'une conspiration du silence. Et en effet, pendant mon séjour de quarante-huit heures à New York et à Washington, je parlai sur cinq chaînes de télévision, et je fus interviewé par les principaux journaux. Mais ce qui me frappa le plus au cours de cette visite, ce fut la détermination avec laquelle les officiels et les journalistes voulaient ignorer toute indication que la direction de l'OLP aspirait à un règlement. Tout ce qui allait à l'encontre de l'image stéréotypée selon laquelle l'OLP, et les Palestiniens en général, n'étaient qu'une bande de terroristes - une sorte de version orientale des Indiens dans les vieux westerns hollywoodiens - était simplement traité par le mépris.