commune. C'était le nationalisme qui les avait remplacées.

Le lendemain, je reprenais l'avion pour Israël. J'avais rarement éprouvé une telle fureur. J'exprimai ce sentiment dans un article que j'écrivis pendant le vol. Les mois suivants, je m'occupai presque exclusivement du massacre. J'y pensais constamment, en parlais, écrivais des articles. J'étudiai en profondeur chaque détail de l'événement, interrogeai des généraux (le plus souvent en secret) et des soldats. Quand le rapport Kahane fut publié, je fus l'un de ses plus violents détracteurs.

Une commission d'enquête, présidée par le juge Itzhak Kahane, avait été nommée à la suite d'un mouvement d'indignation comme Israël n'en avait jamais connu jusquelà. Le gouvernement ayant refusé d'ouvrir une enquête, un immense rassemblement se forma place des Rois d'Israël, là où avait eu lieu la première grande manifestation contre la guerre. Mais cette fois, il y eut quatre cent mille participants, ce qui représenterait, proportionnellement, une manifestation de vingt millions d'Américains ou de cinq millions de Britanniques.

Le gouvernement dut céder, et une commission d'enquête fut créée. Le monde entier suivit son travail. Presque tout le monde en Israël, et partout ailleurs, pensait que le rapport serait suivi de la chute du gouvernement. Mais ce ne fut pas le cas. La commission établit les faits, et décréta que plusieurs dirigeants et officiers israéliens portaient une responsabilité « indirecte » dans le massacre. L'un des principaux personnages impliqués était Ariel Sharon. Après de longues tergiversations, il fut relevé de son poste de ministre de la Défense, mais conserva celui de ministre sans portefeuille.

En ce qui concernait les faits, les conclusions du rapport étaient correctes, mais là où je m'insurgeais, c'est quand il disait que la responsabilité de Sharon et des autres était « indirecte » - une notion qui n'existait pas dans la juridiction israélienne. Ils avaient clairement été complices du crime et auraient dû être accusés d'homicide. C'est ce que j'exprimai ouvertement.

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