Nous découvrîmes une élégante salle ronde, pleine à craquer. L'atmosphère était chargée d'électricité. Dès le début, nous sentîmes que ce ne serait pas une réunion ordinaire.

Pendant que le président ouvrait la séance par quelques phrases, nous eûmes le temps d'observer la salle et de la jauger. L'assistance était composée en partie de Britanniques, des intellectuels engagés, ou simplement des personnes de bonne volonté. Mais il y avait aussi des groupes de militants juifs, et quelques noyaux de Palestiniens.

Issam et moi étions assis côte à côte et échangions nos impressions. Montrant les Arabes, il dit:

- Il faut les faire photographier. Ce sont des hommes d'Abou Nidal.

Les jeunes militants juifs étaient des membres du Betar, une organisation sioniste d'extrême droite réputée pour sa violence.

Je fus le premier à parler, et fus constamment interrompu par les fanatiques juifs. A la Knesset, je suis habitué aux interpellations, et elles m'amusent. Mais quand les choses prirent une tournure dangereuse, les policiers britanniques en uniforme entrèrent en action et expulsèrent de force certains des agitateurs. Lorsqu'Issam se leva pour prendre la parole, le même scénario se reproduisit, mais cette fois ce furent les Palestiniens qui l'interpellèrent bruyamment.

La tension s'accrut encore après la première partie, quand le public fut autorisé à nous questionner. La plupart des questions étaient agressives, provocantes. Les Juifs me mettaient sur la sellette, et les Palestiniens en faisaient autant avec Issam. Je n'avais jamais vu si parfaitement illustrée la conviction que j'ai souvent exprimée dans mes articles: les fanatiques des deux camps, en réalité, collaborent et appartiennent au même parti, le parti qui se voue à prolonger éternellement la guerre.

Heureusement, j'ai enregistré la réunion sur mon petit magnétophone. Voici une transcription des remarques faites par Issam à la fin des débats:

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