lentement. Il voulait progresser pas à pas, bien qu'il comprît que ceci pourrait conduire éventuellement à l'Etat palestinien (tel qu'il est décrit).

Déjà dans les années 70, j'avais proposé qu'il rencontre Arafat secrètement. A l'époque, il avait refusé catégoriquement. Même quand il a serré la main d'Arafat à Washington, il est évident qu'il devait vaincre ses appréhensions. Mais au cours des deux années qui lui restaient, les relations étaient devenues plus étroites. Le vrai Arafat, celui que l'on rencontre en tête-àtête est très différent de celui que les Israéliens voient dans leur imagination. Rabin, qui était plutôt réservé concernant les relations personnelles, et pas enclin à se lier facilement, en était venu à respecter et à faire confiance au dirigeant palestinien, comme Lea en a témoigné.

Rabin a opéré un changement encore plus profond: il avait commencé à voir la version historique de la partie palestinienne et à intégrer le fait que toute la justice n'est pas d'un seul côté. Ce fut un processus lent et profond. Dans son dernier discours à la Knesset, il a déclaré: "Nous ne sommes pas venus dans un pays vide". Ceci est une phrase tout à fait hérétique de la part d'un sioniste convaincu. L'assassin de Rabin et ceux qui étaient derrière lui ont réalisé qu'ils n'avaient plus de temps à perdre.

Ceux qui se prétendent maintenant ses héritiers en sont très loin. Ehoud Barak a réussi, en quelques jours, à détruire tout ce que Rabin avait construit patiemment pendant des années. Barak n'a pas poursuivi là où en était Rabin mais nous a tous fait retourner à la case départ.

La similitude entre Barak et Rabin est très superficielle: tous les deux sont nés dans ce pays, tous deux étaient des soldats professionnels et tous deux chefs d'état-major. Mais Rabin était beaucoup plus qu'un général. C'était une personne honnête et sage avec une grande droiture. Il n'était pas arrogant. Il ne croyait pas que l'on peut contraindre par la force les Palestiniens à accepter des choses qui menacent leur existence nationale. Il avait compris que si l'on voulait parvenir à la "fin du conflit" d'un seul coup, on devait en payer le prix ; et cela, si on n'y est pas prêt, il vaut mieux progresser avec des accords

31